Gaspésia 100 – 2ème étape TP100

Samedi, 54km

Oh que la nuit est courte, le temps de rentrer, manger, ajuster les affaires selon le fait qu’on a plus de drop bag, il est 11h30 quand on se couche pour se relever à 2h30.

C’est pas le moment de manquer de sommeil… Une chance, je m’endors immédiatement et me réveille 5 minutes avant le réveil. J’ai une vraie horloge biologique.

Un petit déjeuner, comme j’adore avant d’aller courir et je suis prête à passer 10 heures dans les sentiers. Prête à me dépasser, quelle que soit la difficulté qui m’attend. J’aime cette petite adrénaline qui m’habite avant départ avec cet inconnu bien propice à la course à pied.

Arrivée sur la plage des pêcheurs, le départ ne se fait pas attendre et on se retrouve rapidement dans l’action. Direction la mer, soit on escalade les roches ou on patauge dans l’eau qui m’arrive au ras des shorts.

Les départs gaspésiens ont le goût de surprendre quand on ne les connaît pas. Je ne suis plus surprise, mais je reste toujours émerveillé et enthousiaste à chaque départ.

Tout va bien

Quand, je cours en trail, souvent je pense à Yannick Vézina qui commence ses podcasts avec un générique qui dit ceci: si tu te sens bien dans un ultra, fait toi s’en pas, ça n’va pas durer… Il a tellement raison, les hauts et les bas sont partis intégrants d’un ultra. La seule chose qu’on espère est que les bas viennent le plus tard possible.

Le départ était donné à 5h du matin, j’espérais rentrer en 10h et moins, si tout allait bien… Christian fait la même distance que moi. On ne court pas ensemble, pour ne pas se nuire l’un à l’autre. Il faut que chacun vive sa course dans son bien-être.

Je pars dans la fin du peloton. Une place qui me convient bien pour ne pas ressentir de pression. Je profite de ce parcours de plage spectaculaire comme au premier jour. Je vous ai déjà dit que courir un ultra, me donne des ailes, je redeviens une enfant. J’adore cette sensation.

Inconvénient

Je suis sur un terrain connu, un chemin que je refais pour la 4ème fois. Je ne le connais pas par cœur non, mais je reconnais facilement les places.
J’avance à mon rythme sans me soucier des autres coureurs. Je me fais dépasser, j’en dépasse, mais je n’ai aucune idée s’il y a beaucoup du monde derrière moi. Je ne cours pas à la montre, mais au ressenti.

Une fois sortie, de la plage, de la voie ferrée, la grande route, on atteint le sentier qui va nous conduire à la rivière aux émeraudes. Un lieu qui vaut le détour. Je n’ai pas étudié le tracé. Je prends pour acquis que c’est le même. J’avance, j’avance, mais je suis inquiète, car je ne vois pas la traversée de la rivière.

Je reconnais parfaitement la place, mais aucune signalisation dans cette direction. J’attends qu’un coureur arrive en espérant qu’il y en ait au moins un…

Au bout d’un petit 5 minutes, mon sauveur ! Oufff, heureusement, que j’ai eu l’idée d’attendre, car il ne fallait pas du tout passer où je voulais. Le tracé était très bien indiqué, mais j’étais dans l’obsession de vouloir traverser la rivière.

Pierre-Paul Carrière

Mon sauveur s’appelle Pierre-Paul Carrière. Nous décidons tous les deux de faire route ensemble pour nous entraider et nous pousser l’un à l’autre. Il ne se sent pas au mieux de sa forme.

La course à pied est favorables aux rencontres, en discutant, en faisant connaissance, les kilomètres défilent à une allure incroyable sans s’en rendre compte.

Nous arrivons au ravito de Val d’Espoir, Pierre-Paul veut arrêter. Il essaie en vain de chasser un mal de tête qu’il traîne depuis la veille. Un manque de repos.

En tant que coureur amateur, nous cumulons beaucoup, d’entraînements, conjugué avec le travail et la famille. Certaines semaines sont plus chaotiques que d’autres pour que ça marche et pour lui c’était une mauvaise semaine.

Je réussis à le convaincre de poursuivre jusqu’au prochain ravito et de refaire le point à Anse à Beaufils avant d’aller à la commune.
Chouette, il accepte de faire une section pour Béat, je suis très contente, mais j’espère aussi que ça ira bien pour lui. Je sais que c’est très désagréable d’avoir des pressions dans la tête à chaque foulée comme il a présentement.

Parcours solitaire

Pierre-Paul a déclaré DNF après 25km de parcours commun. Sa compagnie a été très agréable et m’a vraiment permis d’avoir un rythme soutenu en marche rapide ou petit trot. Parfait pour préserver mon genou.

Je suis triste de repartir seule, mais j’ai la force mentale pour me rendre à la ligne d’arrivée. Je ne perds pas trop de temps au ravito, je prends un verre d’eau chaude, quelques fruits et je repars.

En arrivant à l’Anse à Beaufils, j’ai croisé Christian qui repartait, je vais essayer de le rejoindre pour compléter avec lui.

Rattraper Christian, oui, mais je ne veux pas me brûler pour autant, car je ne dois pas perdre de vue que demain il y a 35 km et il me reste encore 27 km aujourd’hui… Je décide donc de me concentrer sur mon chemin et j’oublie mon plan de rattraper Christian.

Je repars clopin-clopant toujours en mouvement, tant que tu avances… C’est rare, mais mon cerveau est vide… Je me surprends de constater que je ne réfléchis à rien… Je ne fais pas de plan pour mes futurs projets, rien de rien… Qu’est-ce qui m’arrive ? Ce n’est pas moi ça ?

Coureurs en sens inverse

Cela fait 5 ou 6 heures que je cours, quand je croise les premiers coureurs du 100km en un jour et/ou du 80 km ainsi que du 160. Je les salue, les félicite, je suis déconnectée de ma course depuis quelques kilomètres.

Croiser d’autres coureurs, me permet de me remettre en piste. De recréer l’étincelle qui m’allume et se transforme rapidement en brasier. Je suis de nouveau surexcitée de courir comme devant une foule en délire.

Quel plaisir de s’encourager et de revoir mes amis dans les sentiers gaspésiens. Maxime Carrier, Mélissa Ahier, Yves Lévesques, Benoit d’Aoust, Catherine Bujold, Israël Michaud, Véronique Lécuyer, Karine Litalien, Bruce Guitard, Mathieu Fortin, Éric Girard, Yann Bernier, Kim Gaudet, etc… La famille est grande et ne cesse de s’agrandir au fil des années, alors j’en oublie peut-être…

Je recevais des nouvelles de Christian, qui était à 2 – 3 minutes, comme sur les chemins de Compostelle, pas besoin de téléphone pour avoir des nouvelles. 2 minutes, c’est peu, mais c’est difficile à rattraper pareil. Je suis contente de savoir que ça va bien pour lui.

Je continue mon petit train-train comme ça, en ayant juste le goût de profiter du sentier, suivre les fanions sans me perdre.

Coureurs stressants

Au ravito de la Commune, je suis accueillie comme une reine par les 3 jeunes filles bénévoles. Elles sont au petit soin. Ce sont des étudiantes en tourisme plein air, qui vont dormir dans une tente pour servir les coureurs pendant 2 jours.
Il fait froid, mais elles sont très courageuses, heureuses d’être ici. Nous voir courir, leurs donnent le goût de courir aussi. Je reste une dizaine de minutes à me réchauffer le cœur en discutant avec elles. Christian est reparti depuis quelques minutes.

Je repars pour le prochain ravito avec la satisfaction du devoir accompli. J’ai le sentiment d’avoir réussi ma course, même si j’ai encore 20 km environ.

J’avance bien, doucement, mais sûrement. Je ne croise plus de coureurs depuis un bout, c’est bien dommage cela me boostait vraiment.

Puis à quelques mètres du ravito Gargantua, des coureurs me dépassent. Wow, avec des jambes comme ça, ils viennent juste de partir. Cool, une nouvelle animation, un nouveau boost…

Je déchante vite, ce ne sont pas du tout le même genre de coureurs. Je sens tout de suite la pression quand il y en a un qui arrive. Pourtant, je m’arrête pour les laisser passer avant qu’il me colle au derrière… Je ne veux pas les nuire, mais cela les oblige à ralentir peut-être un peu trop à leur goût, je ne sais pas…

Finir à la marche

On n’est pas dans la même game, c’est certain. Ça me change des coureurs précédents avec lesquels on a pris le temps de faire des câlins, échanger rapidement.
Ce n’est pas agréable d’avoir ces coureurs qui me poussent dans la fin de mon parcours. Malgré tout, cela me boost pareil, me redonne un nouvel air d’aller.

Mon genou gauche fait de plus en plus le capricieux. Certaines douleurs me portent au cœur, mais je continue d’avancer. Puis je me mets à vomir, ah non, pfff… Des coureurs me dépassants s’inquiètes et veulent m’apporter leur aide.
Je leur dis que tout va bien, ça va se placer… Une jeune fille a vraiment du mal à me laisser seule. Je devais avoir une sale tête…

Une fois le mal être passé, je repars très mollo, mollo, jusqu’au moment… Mon genou part en avant, outch, je ne peux plus poser le pied au sol… Je me retiens in extrémiste… aille, aille, j’ai gagné le pot aux roses… M….,
Je sens la panique m’envahir, puis en respirant doucement, cela se replace. Je repars doucement, zut, il repart de nouveau…

Grrr, je viens juste de rentrer dans la forêt enchantée. La route menant à Percé passe à proximité. Je sors du sentier pour avoir un terrain plus stable. Le genou se repositionne tranquillement. Je reprends le sentier un peu plus loin pour finir tranquillement à la marche.

Ce n’est pas une récidive

Je peux de nouveau appuyer mon pied, mais je n’ai pas le droit à l’erreur, je sens que le genou veut partir dans tous les sens. J’ai pas prévu mon attelle qui m’aurait bien aidé dans cette situation.
Je me croyais guéri. Je pensais que mon genou ne ressortirait plus du rail, si je ne retombais pas… Je pense que le terrain boueux l’a trop sollicité…

Ce n’est pas le moment de chercher le pourquoi du comment, j’ai une course à finir et je vais la finir. Je dois rester vigilante et conservatrice, car j’ai encore un 35 km qui m’attend demain. Donc environ 40 petits km pour compléter mon objectif. J’en suis capable. Il me suffit d’être très attentive à mon genou et ou je mets les pieds.

J’arrive au fil d’arrivée, heureuse et déçu à la fois, car je voulais mettre 10h max et là je complète en 10:54. Je suis très mal, je ne me sens pas bien, le temps de saluer Julien Conte et je me retrouve de nouveau à vomir sur la place publique… Quelle honte…

Une dame va chercher les secours, je suis prise en charge par l’équipe médicale qui me donne un bouillon chaud qui me fait le plus grand bien. Je me repose quelques instants avant de pouvoir rentrer me requinquer pour repartir le lendemain sur la 3ème étape.

Gaspésia 100 – 2023
Gaspésia 100 – 3ème étape TP100

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